
Alan Turing à 16 ans
Crédits : Heritage Images / Contributeur - Getty
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En 1939, la guerre vient d’éclater et Alan Turing, jeune mathématicien britannique sorti de Cambridge, rejoint Bletchley Park où, dans le plus grand secret, les Britanniques tentent de percer les communications ennemies.
Depuis quelques temps, le commandement militaire allemand utilise pour protéger ses communications les machines Enigma, créées d’abord à des fins de secret économique.
Ces machines proposent des possibilités de chiffrement vertigineuses. Faute de pouvoir en percer la combinaison, les Alliés sont incapables de déchiffrer les messages qu’ils interceptent.
En temps de guerre l’information est vitale : déchiffrer les communications ennemies permettrait de connaître les attaques projetées, les positions des unités adverses etc.
"Il ne suffisait pas aux Britanniques de mettre la main sur une machine. L’intérêt de l’Enigma, c’est que si votre ennemi en capturait une, ça ne l’aiderait pas, à moins qu’il n’en connaisse la configuration précise de tous les éléments au moment où le message a été envoyé." David Kenyon, historien à Bletchley Park.
S’engage, dès septembre 1939, une titanesque entreprise de cassage des codes allemands, une lutte contre la montre d’autant plus décourageante que chaque matin, les clés de chiffrement sont modifiées.
A Bletchley Park, un manoir entouré d’un vaste domaine situé au nord-ouest de Londres sont rassemblés linguistes, cruciverbistes, logiciens et autres esprits vifs qui planchent sur le problème.
On trouve aussi des mathématiciens recrutés dans les universités voisines d’Oxford et Cambridge.
Parmi eux, Alan Turing, un jeune type brillant, secret et un peu loufoque. Féru de cryptologie, il pressent que l’ampleur de la tache (trouver le bon réglage parmi les milliards de milliards de possibilités) nécessite une nouvelle approche du problème.
"L'idée qui va s'imposer à Turing c'est qu'on peut avoir les meilleurs mathématiciens, les meilleurs génies de notre temps, on ne pourra jamais, avec une réflexion humaine, se battre cette machine. Donc l'idée de génie c'est de se dire : contre une machine, il faut inventer une autre machine." Arnaud Delalande
Ces contre-machines, calculateurs programmés pour "mouliner" jusqu’à trouver la bonne clé de chiffrement sont baptisées les "bombes", possiblement en référence à… un dessert polonais.

https://learncryptography.com/assets/content/images/bombe.jpg
C’est que le cassage de l’Enigma, qui aurait permis in fine d’écourter la guerre de deux ans et d’épargner près de quinze millions de vies humaines, avant d’être une réussite britannique, avait bénéficié des avancées d’autres services de renseignements : polonais, ou français…
Auteur : Amaury Chardeau
Source : https://www.franceculture.fr/emissions/grande-traversee-lenigmatique-alan-turing/enigma-la-guerre-du-code

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« La prise de Mascara », estampe, 1836. Gallica-BnF
Retronews : Pourquoi Charles X décide-t-il en 1830 de l’expédition d’Alger ?
Jacques Frémeaux : Il s’agit d’une opération de prestige du gouvernement de Charles X, qui cherche alors à imposer en France une politique réactionnaire et un gouvernement plus autoritaire. Il estime avoir besoin d’une opération de cette envergure pour donner l’image d’un pouvoir fort, qui doit permettre de faire passer des réformes de politique intérieure.
Comment se déroule l’expédition ?
De très gros moyens sont mis en œuvre. On rassemble près de 40 000 hommes et des moyens navals considérables.
Contre l’adversaire, Alger était très bien défendue par des batteries mais il n’y avait pratiquement plus de marine algérienne, elle ne pouvait donc pas défendre les côtes. Les Français se gardent bien d’attaquer directement Alger, mais débarquent à Sidi-Ferruch, à une vingtaine de kilomètres à l’ouest.
Le débarquement a lieu en été, on craignait des tempêtes, mais finalement l’escadre arrive par beau temps et réussit à débarquer ses troupes. En quelques jours, l’armée marche sur Alger. Le 5 juillet, la ville capitule.
Qu’en pense alors l’opinion publique française ?
Une partie de l’opinion est satisfaite, car la réputation d’Alger, que l’on accuse d’être traditionnellement un nid de pirates, est assez mauvaise.
L’opposition en revanche est très hostile : on dénonce cette opération de prestige comme allant de pair avec le recul des libertés (voir notre dossier sur la suspension de la liberté de la presse). Les Trois Glorieuses, du 27 au 29 juillet, aboutissent au renversement de Charles X. L’expédition n’a pas suffi à sauver le régime.
Lorsqu’il succède à Charles X, Louis-Philippe a-t-il les mêmes velléités de conquête que son prédécesseur ?
Le retrait de la France serait une perte de prestige pour le nouveau régime. Par ailleurs, dès leur arrivée, les autorités françaises ont expulsé les représentants turcs qui gouvernaient l’Algérie, et on ne saurait à qui laisser le pouvoir. Et puis il y a l’idée selon laquelle Alger est « importante » pour la position de la France en méditerranée.
Le gouvernement de Louis-Philippe se maintient donc, mais ne fait pas beaucoup d’effort de conquête. La situation est très tendue en Europe, on préfère garder des forces en France. On retire donc la plus grande partie du corps expéditionnaire.
À partir de 1832, Abd el-Kader, seulement âgé de 24 ans, s’impose à quelques tribus d’Oranie comme le chef de la résistance à l’occupation française. La France signe avec lui deux traités, en 1834 et en 1837. L’occupation restreinte se met en place. Il faut organiser la colonie, y installer des garnisons, mais en se contentant de contrôler les côtes, sans aller plus loin dans le pays. Le gouvernement décide « l’occupation restreinte ».
Comment se déroule cette occupation, prémisse de la colonisation ?
Dès le début, les Français se heurtent à des résistances à l’occupation, que ce soit par des tribus locales qui n’acceptent pas la présence française, ou par des forces plus centralisées – comme celle d’Abd el-Kader. À l’est, dans la province de Constantine, le bey Ahmed reste fidèle au sultan de Constantinople. Plusieurs opérations sont lancées afin de récupérer Constantine, ce qui est fait en 1837, après un premier échec en 1836.
Puis, en 1839, Abd el-Kader déclare la Guerre sainte à la France, après la violation du traité de Tafna par les autorités françaises, traité qui devait assurer à Abd el-Kader l’autonomie des deux tiers du territoire algérien. Il y a à ce moment-là une rupture avec les Français. On envoie davantage de troupes – jusqu’à 110 000 hommes.
En 1841, le général Bugeaud programme l’occupation systématique du pays et la guerre de conquête de l’Ouest algérien, puisque l’est est déjà soumis avec la prise de Constantine.
En 1847, c’est la reddition d’Abd el-Kader après une guerre particulièrement violente. La Grande Kabylie n’est occupée qu’en 1857. Les insurrections se poursuivent jusqu’en 1871 au moins. Le Sahara n’est totalement occupé qu’au début du XXe siècle.
S’ouvre alors la période de colonisation à proprement parler…
En réalité, elle a même commencé dès le début de la conquête : des colons se sont installés dans les villes, d’où les habitants partaient pour éviter le contact avec l’armée française, qui se livrait à un certain nombre d’exactions. À Alger, puis à Oran, les colons ont fait des achats de terres très tôt, et dans des conditions très irrégulières…
L’installation de colons autour des villes d’Alger et d’Oran et l’idée de la colonisation étaient déjà dans le projet du gouvernement de Louis-Philippe, mais c’était alors assez difficile à réaliser et donc limité. Avec la prise en main de Bugeaud, la colonisation s’étend.
Comment se passent les premiers temps de la colonisation ?
Quelques notables gouvernent avec les Français, mais dans l’ensemble la population est hostile : il y a l’idée que l’occupation par les Français chrétiens n’est pas légitime, et l’espoir qu’ils puissent être chassés par une insurrection ou des interventions extérieures. Mais les habitants sont plus ou moins obligés de se résigner. C’est le cas de la plus grande partie des notables, qui passent au service des colonisateurs.
La colonisation s’établit et se développe vraiment au moment de la Révolution de 1848, avec l’arrivée d’un certain nombre de chômeurs de villes françaises qu’on essaie d’établir en Algérie.
Les colons ont beaucoup de revendications en matière de terre, et aussi de gouvernement du pays, mais l’armée met un frein, car elle craint de se heurter au mécontentement de la population algérienne. Et puis, installer des colonies européennes crée une vulnérabilité en cas d’insurrection.
C’est donc sous la IIIe République, période durant laquelle l’armée perd une partie de son autorité, que la colonisation va vraiment se développer. De 1880 à 1900, on passe de 100 000 à 700 000 colons, dont la majorité vit dans les villes d’Algérie.
Propos recueillis par Marina Bellot.
Auteur : Jacques Fremeaux, Professeur d'histoire contemporaine, Sorbonne Université

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